mercredi 24 décembre 2014

La citoyenneté romaine, une communauté inégalitaire...

L’inégalité des citoyens

Un patron, Virron, invite à dîner son client Trébius.

En premier lieu, persuade-toi bien que l'invitation que tu reçois est pour toi le salaire intégral d'une longue suite de services ren­dus. Le bénéfice de l'amitié d'un grand, c'est la nourriture [...].
Lui, Virron, il prend en main des coupes où le béryl1 fait saillie. À toi on ne confie aucun ustensile qui soit en or, ou si cela arrive on met à tes côtés un surveillant pour y dénombrer les pierres précieuses et observer tes ongles crochus [...]. Voici qu'un esclave te présente, en grognant Dieu sait comme, un pain qu'à peine il daigne rompre, morceaux déjà moisis faits d'une farine compacte sur lesquels la mâchoire travaille sans réussir à les entamer. Au maître, on en réserve du ten­dre, qui est un blanc neigeux et fabriqué avec la fine fleur de froment[...]. Essaie seulement de desserrer les lèvres, et tu seras traîné par les pieds et déposé dehors [...]. Il y a tant de choses qu'on n'ose articuler quand on porte un habit râpé ! [...]
Tu te crois un homme libre et le convive de ton « roi ». Lui, il te considère comme le prisonnier de la bonne odeur de sa cuisine [...]. C'est l'espoir de bien dîner qui vous dupe [...]. Il a raison de te traiter ainsi, car si tu es capable de tout supporter, c'est que tu le mérites. Un beau jour, tu offriras, crâne tondu, les joues à ses soufflets, tu accepteras la cuisson des coups de fouet tu seras digne d'un tel festin et d'un tel ami.
Juvénal, Satires, début du IIe siècle.



Des citoyens inégaux devant la justice

Ceux qui arrachent ou arasent les bornes ou les arbres marquant des limites, s'ils sont esclaves et qu'ils l'aient fait de leur propre initiative, sont condamnés aux mines ; s'ils sont humiliores, ils sont condamnés aux tra­vaux publics ; s'ils sont honestiores, ils sont relégués dans une île après confiscation du tiers de leurs biens. [...]
Ceux qui violent une vierge, non encore en puissance maritale, s'ils sont humiliores, sont condamnés aux mines ; s'ils sont hones­tiores, ils sont relégués dans une île. [...]
Celui qui, en vue de le livrer au stupre ou d'en tirer plus d'argent, a castré ou fait cas­trer un homme malgré lui, qu'il s'agisse d'un esclave ou d'un homme libre, peu importe, est puni de mort ; les honestiores eux sont déportés dans une île après confiscation de leurs biens.
Ceux qui donnent un philtre abortif ou un philtre d'amour, parce qu'il s'agit là d'un mauvais exemple, sont condamnés aux mines s'ils sont humiliores ; s'ils sont honestiores, ils sont relégués dans une île après la perte d'une partie de leurs biens.
Paul (juriste romain), Sentences, vers 230



La Bible et les privilèges juridiques du citoyen romain : Paul, apôtre de Jésus, bénéficie de la justice impériale.

On allait attacher Paul pour le fouetter quand il dit au centurion de service : « Un citoyen romain, qui n'a même pas été jugé, avez-vous le droit de lui appliquer le fouet ? ». À ces mots, le centurion alla mettre son supérieur au cou­rant : « Qu'allais-tu faire ! L'homme est citoyen romain ! ». Le supérieur revint donc demander à Paul : « Dis-moi, tu es vraiment citoyen romain ? » « Oui, dit Paul [...], je le suis de naissance ». Ceux qui allaient le mettre à la question le lais­sèrent donc immédiatement ; quant au chef, il avait pris peur en découvrant que c'était un citoyen romain qu'il gardait enchaîné.
Actes des Apôtres, 22, 25-29, fin du Ier siècle.

Paul répliqua : « Si vraiment je suis coupable, si j'ai commis quelque crime qui mérite la mort, je ne prétends pas me soustraire à la mort. Mais si les accusations dont ces gens me chargent se réduisent à rien, personne n'a le droit de me livrer à leur merci. J'en appelle à l'empereur ! ». Le gouverneur Festus prit alors l'avis de son conseil et répondit : « Tu en appelles à l'empereur : tu iras devant l'empereur. »

Actes des Apôtres, 25, 11-12, fin du r siècle.

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